Anne Garréta, qui bénéficie déjà d’une grande reconnaissance critique, autant en France qu’en Amérique du Nord, occupe une posture singulière : elle est entrée à l’Oulipo, groupe où les femmes étaient très minoritaires, avec une œuvre interrogeant le genre. Ces deux aspects se sont rencontrés dans un travail formel original, particulièrement élaboré, dans le domaine de la prose.
Durant ces deux journées, nous l’étudierons en prenant pour point d’appui ce que les oulipiens nomment le clinamen : l’exception qui confirme la règle, ou selon une citation de Klee qu’affectionnait Perec « l’erreur dans le système ». À la fin de Pas un jour, la narratrice remarque ainsi : « Et bien entendu, infoutue tu fus de respecter les règles que tu t’étais prescrites à l’origine de ce projet. Ce n’est plus même clinamen, c’est déflexion maximale… »
Cette propension semble généralisable à l’œuvre, au-delà de ce seul livre. Ainsi, Anne Garréta, qui s’est dite « en révolte à l’endroit des formes courantes de la fiction » (dans un entretien avec Mathieu Lindon), porte ce conflit au sein de son œuvre, en fait l’enjeu de la réception, mettant en crise la narration ou le récit, via les réécritures, les emboîtements narratifs ou la problématisation de l’instance narrative. La narration ne raconte pas exhaustivement, elle se construit à partir des genres reçus, et contre eux : roman d’amour, roman d’apprentissage ou autofiction. Le roman formaliste se fait fiction critique.
Programme :
Vendredi 15 novembre, Université Paris Diderot, bâtiment des Grands Moulins, entrée C, 6e étage, salle Pierre Albouy
10h
Ouverture du colloque par Dominique Rabaté, directeur du Cerilac (Paris Diderot)
10h30
Matinée présidée par Dominique Rabaté
Béranger Boulay (Paris 13) : L’Ouvroir de l’Histoire
Annabel Kim (Harvard) : La forme est une arme : la machine de guerre garrétienne
14h
Après-midi présidé par Éric Marty (Paris Diderot)
Audrey Lasserre (UCLouvain): À partir de l’article « Comment écrire des femmes ? et comment écrire de leur écriture ? » Anne Garréta et l’écriture-femme
Cécile De Bary (Paris Diderot): Un jeu de mots généralisé ? « La poésie, on s’en balaie, on s’en baleine… »
Alain Schaffner (Paris 3 Sorbonne nouvelle) : L’ancien et le nouveau dans Éros mélancolique
Samedi 16 novembre Université Paris 3, centre Censier, 3e étage, au fond du couloir en direction du nord, salle Las Vergnas
10h
Matinée présidée par Florence Lotterie (Paris Diderot)
Valérie Beaudouin (Télécom Paris Tech, Oulipo) : L’écriture et la machine chez Anne F. Garréta.
Peter Consenstein (CUNY, New York) : Anne Garréta, « grande dame ».
14h
Après-midi présidé par Olivier Wagner (BNF)
Catherine Perret (Paris 8): Dans l’béton : de la contrainte à la ventriloquie.
Morgane Cadieu (Yale) : Terrasser le déclassement
16h
Rencontre avec Philippe Vasset
Organisation :
Cécile De Bary (Cerilac, Paris Diderot)
Alain Schaffner (Thalim, Sorbonne nouvelle)
Comité scientifique : Alison James (University of Chicago), Éric Marty (Paris Diderot), Florence Lotterie (Paris Diderot), Dominique Rabaté (Paris Diderot), Jean-Jacques Thomas (SUNY-Buffalo).
Contact : cecile.debary@univ-paris-diderot.fr
Lien vers la page du colloque : https://cerilac.univ-paris-diderot.fr/agenda/anne-garreta-clinamen
Le programme est disponible ici au format pdf.